Handicaps psychiques et vieillissement : longues vies au foyer !
Depuis quelques années, la question du vieillissement est de plus en plus présente dans le débat public. Ce débat met en lumière un fossé entre les pratiques et les perceptions modernes et celles d’autrefois concernant nos aînés. Autrefois, les « anciens » étaient valorisés dans les traditions et les cultures. Aujourd’hui, dans nos sociétés modernes, le vieillissement est souvent perçu comme une menace. Jacques Brel a bien exprimé cette angoisse dans ses chansons « Les vieux » et « Vieillir ». La vieillesse pose aussi des questions éthiques dans notre société.
Jean-Jacques Amyot souligne un paradoxe : on valorise beaucoup l’autonomie, mais dans les faits, les personnes âgées sont souvent privées de leur capacité à agir et à prendre des risques. Ce contrôle social repose sur l’idée de « bien vieillir ».
Accompagner dignement le vieillissement, c’est affronter des enjeux psychiques souvent évités : la perte, la dégradation, le manque, la solitude, le risque de vivre et la mort.
Schizophrénie et vieillissement : quelques repères.
Avec l’âge, une personne atteinte de schizophrénie gagne en expérience face à sa maladie. Les hallucinations et les idées délirantes deviennent moins envahissantes, et les sentiments de persécution s’atténuent. En conséquence, les crises psychiques semblent moins fréquentes. Le déni des troubles persiste, mais il permet à la personne de trouver un équilibre face aux défis de la vie.
Prenons l’exemple de Paul, 68 ans, qui évoque souvent ses « petites copines en ville ». En réalité, ces visites se résument à saluer les commerçants de son quartier. Sans être délirants, ses propos montrent comment Paul aménage son rapport aux autres : il se montre sociable et désireux de contacts humains.
Cependant, les symptômes « négatifs » de la schizophrénie, comme la baisse de la motivation et des capacités cognitives, peuvent s’accentuer. Un environnement peu stimulant peut aggraver cette tendance, tandis qu’un cadre riche en interactions sociales peut aider à maintenir un équilibre psychique.
Avec l’âge, les personnes atteintes de schizophrénie peuvent également connaître des phases dépressives, qu’il ne faut pas banaliser en les attribuant uniquement à l’âge ou à la maladie.
L’accompagnement au fil du ‘’cours-ans’’.
Paul a perdu en autonomie et se déplace désormais avec un déambulateur. Il a besoin d’aide pour la douche à cause de son diabète, mais il refuse souvent cette aide, invoquant des raisons variées. Trouver un compromis entre ses souhaits et les soins nécessaires est difficile, surtout avec l’âge, car les habitudes deviennent plus rigides.
Paul appréhende de descendre en ville seul en bus, alors il est accompagné une fois par semaine pour ses courses. Il est conscient de sa perte d’autonomie, ce qui affecte son estime de soi. L’accompagnement vise à compenser cette perte tout en travaillant sur son autonomie pour éviter une dépression liée aux sentiments de perte.
Lors des réunions hebdomadaires, Paul liste les services qu’il rend au foyer, montrant qu’il est actif et a une place. Bien que fatigant pour lui, ces activités ont un sens psychique important. Les professionnels doivent évaluer s’il est préférable de le laisser faire ces activités, voire de l’encourager.
Conclusion :
Ce tour d’horizon entre théorie et pratique montre que le vieillissement est un processus. L’accompagnement doit être dynamique et évolutif, nécessitant des ajustements et une posture éthique. Les liens affectifs et relationnels sont essentiels et doivent guider les professionnels dans l’accompagnement des personnes âgées.
Coralie Leprevost (A.E.S) ; Pierre Bidanel (psychologue).